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Hector BUISSNEG
8 avril 2010

La 1ère bibliothèque - Alexandrie, Egypte

Site web en français : www.bibalex.org
Galerie de photographies : www.bibalex.org/French/gallery/index.htm

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La 1ère bibliothèque : 9/78. - s.n. : s.l. ; s.d. - 30 x 24 mm
Magnet Le gaulois - Les Découvreurs

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Cliquez ici pour accéder à la page de téléchargement du
PDF de Présentation du projet de construction de la nouvelle bibliothèque par le bureau Snohetta

 

 

Projet - A2 20H - 12/02/1990 - 01min32s

A Assouan en Egypte, cérémonie officielle du lancement de la campagne en faveur de la reconstruction de la bibliothèque d'Alexandrie, sous l'égide de l'UNESCO. Participants : FRANCOIS MITTERRAND, HOSNI MOUBARAK, SOPHIE D'ESPAGNE, la reine NOUR DE JORDANIE, le cheik ZAYED d'Abou Dhabi. Interview de FEDERICO MAYOR (directeur général de l'UNESCO) devant une entrée de temple, au sujet du projet de reconstruction de la bibliothèque.

 

La nouvelle bibliothèque d'Alexandrie / Eve Sivadjian*

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©James Willis

Des siècles après l'incendie de la première bibliothèque, la «Nova Alexandrina» doit rendre à l'Egypte son rayonnement culturel. Elle ouvrira ses portes à l'été 2001.

 

C'est à un professeur d'histoire amoureux de sa ville et fin lettré que l'Alexandrina moderne doit son existence. Mostafa ElAbbadi avait consacré des années d'études à l'antique bibliothèque, fondée vers l'an 295 av. J.-C. par Ptolémée Sôtêr et son conseiller, Démétrios de Phalère. Passionné par ses découvertes, ce nouveau Démétrios se prend à rêver de restituer à sa ville le joyau perdu qui faisait son renom. Il gagne à sa cause Loutfy Dowidar, président de l'université alexandrine, et ils communiquent leur ardeur au président Moubarak, puis à l'Unesco. Il fallut tout de même douze ans, de 1974 à 1985, pour que le rêve devienne projet. En 1986, l'étude de faisabilité conclut à l'intérêt de cette implantation «qui sera un levier de développement» pour l'ensemble de la région. La première pierre est posée en 1988 et le concours international d'architecture, lancé en 1989, récolte les soumissions de mille deux cent cinquante architectes de dix-sept pays. Le projet de l'agence Snohetta d'Oslo, un groupe de jeunes en majorité Norvégiens, soulève l'enthousiasme car il représente «un Soleil qui ne cesse de se lever».

Alexandrie retrouve enfin sa mémoire. Ou plutôt, une mémoire. Il est inexact, en effet, de parler de «renaissance» de l'Alexandrina, car il ne reste rien des antiques collections, pas le moindre vestige des sept cent mille volumes, copies et originaux mêlés, qui, dit-on, s'y trouvaient en l'an 48 avant Jésus-Christ, lors de son incendie. Aucune trace non plus de ses jardins, de ses portiques sous lesquels les philosophes confrontaient leurs idées. Mais l'imaginaire collectif a renoué d'emblée le fil fictif entre passé et présent pour rendre à la cité hellène, qui régna sur le monde méditerranéen pendant près de trois siècles, sa bibliothèque perdue et, au monde, son archétype !

Il fallait, en effet, le poids de l'opinion mondiale pour réunir les capitaux : 180 millions de dollars. Si l'Egypte a assumé une partie, ainsi que le terrain, le solde provient de souscriptions internationales, auxquelles ont largement participé les pays arabes, et de dons de divers pays. L'Allemagne a offert le circuit de déplacement des documents, le Japon, l'équipement audiovisuel, l'Italie, le laboratoire de restauration des manuscrits et la formation des restaurateurs. La France, elle, a livré l'ensemble du système informatique sur le modèle de celui de la Bibliothèque nationale, comprenant la formation du personnel.

Il a fallu attendre sept ans entre la pose de la première pierre et le lancement du chantier.

L'emplacement choisi pour la moderne Alexandrina est à la fois symbolique et pratique. Symbolique, parce qu'il est face à la mer, par où venaient les navires que les «pisteurs» de manuscrits arraisonnaient à quai, le temps de confisquer les originaux au profit de la bibliothèque, et d'en rendre des copies. En bordure de la vieille ville active, à proximité de l'université d'Alexandrie et de l'université francophone Léopold-Sédar-Senghor, l'endroit est également pratique. Sur 140 000 mètres carrés s'élève la bibliothèque elle-même, cylindre tronqué de onze étages, entouré de bassins pour rafraîchir l'ambiance et arrêter sables et poussières, fléaux d'Alexandrie. Mais le site compte aussi un planétarium, un musée d'archéologie, calligraphie et sciences, une école internationale de sciences de l'information, avec une école supérieure de bibliothéconomie et des édifices réservés aux congrès. La bibliothèque compte deux mille places. Sa capacité d'archives, d'un maximum de cinq à six millions d'ouvrages, sera remplie progressivement. Elle ouvrira avec un fonds de deux cent mille volumes, grâce à la politique d'acquisitions menée par le docteur Mohsen Zahran, directeur général du projet. Bien que l'inauguration soit prévue pour l'été 2001, l'effectif de cinq cent soixante-dix-huit personnes est en grande partie déjà engagé. Ce sont, en majorité, des universitaires de toutes les disciplines, actuellement envoyés en formation en France, en Angleterre et aux Etats-Unis. Quant au budget de fonctionnement des cinq premières années, il est évalué entre 20 et 30 millions de dollars par an. Sept ans se sont écoulés entre la pose de la première pierre et le début des travaux, en 1995. Car les ouvrages de terrassement de la bibliothèque mirent au jour ce que tous savaient : les ruines de l'antique quartier royal. On exhuma un certain nombre de trésors qui seront exposés dans le musée de la bibliothèque. La guerre du Golfe, en janvier 1991, participa aussi au gel des travaux, car les financiers des Emirats eurent alors d'autres priorités. 

«L'informatisation de l'Alexandrina représente un enjeu important, affirme Gérald Grunberg, ancien conservateur à la Bibliothèque nationale à Paris et conseiller auprès de l'Organisation générale de la bibliothèque d'Alexandrie, car elle sera jugée sur ses capacités à communiquer avec le reste du monde. Ce sera la première bibliothèque arabe à mettre en ligne ses richesses, et elle devra être capable de recevoir tous les types de données : textes, images et sons.» Le système retenu représente une nouvelle étape pour l'informatisation des bibliothèques. Pour la France, qui l'a conçu, offert et installé, l'enjeu de l'Alexandrina est double : culturel et économique. Culturel, parce qu'elle assoit la francophonie dans cette région du globe, très francophone. Trente pour cent du personnel de la bibliothèque parle le français et Alexandrie compte plusieurs écoles françaises. Enjeu économique, car les entreprises françaises sont bien implantées en Egypte. Et l'informatisation de la bibliothèque constitue une vitrine prometteuse sur le marché, en expansion, des grandes bibliothèques.

L'Alexandrina fut incendiée par accident

On en parle depuis deux mille ans ! C'est dire à quel point cette bibliothèque suscite les passions. Malgré les écrits de César, qui voulait sans doute disculper son armée, il semble attesté qu'un incendie qui visait les chantiers navals aurait anéanti la bibliothèque et le muséïon adjacents, partie du palais royal située sur le port, lors de l'attaque de la ville par les Romains en 48 av. J.-C. Ce fut, pense-t-on, un accident. Comment se fait-il, dès lors, que chrétiens et musulmans n'aient cessé ensuite de se rejeter la paternité de ce crime? Parce que l'Alexandrina avait une annexe, dans le temple dédié à Sérapis, au cœur de la ville. Elle abritait, entre autres, les deux cent mille volumes de la bibliothèque de Pergame, offerts par Antoine à Cléopâtre. Et il semble que, sur plusieurs siècles, chrétiens et musulmans se soient relayés pour faire disparaître ce fonds-là. Les empereurs chrétiens détruisirent d'abord le Serapeum, incendiant et fermant de nombreuses bibliothèques. Il resta assez de trésors cependant pour qu'au Xlle siècle Saladin, après avoir conquis l'Egypte, fasse vendre, pour payer l'armée, cent vingt mille «livres anciens immortels», restes d'une bibliothèque de deux millions de volumes. Mais, contrairement aux affirmations d'un manuscrit du XIIe siècle, ce ne fut sans doute pas le général Amr Ibn AI-As, lors de l'invasion de l'Egypte par les Arabes en 642, qui brûla les volumes de la bibliothèque antique en alimentant la chaufferie des bains publics d'Alexandrie pendant six mois.

*publié dans le GEO num. 264 de février 2001


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